Et maintenant ?

Et maintenant ?

L’océan Pacifique est grand, très grand, et il comprend de nombreuses îles qui ne nous sont pas toujours familières. C’est d’ailleurs la raison qui nous avait poussée à vous proposer une carte permettant de s’y repérer un peu mieux. Les dimensions véritablement gigantesques de cet océan – dont nous avions pris la mesure en traversant du Chili à la Polynésie – ainsi que les richesses touristiques et culturelles qu’il recèle, nous avaient incités à y prévoir un séjour plus long qu’ailleurs autour du globe. Deux saisons hivernales, ainsi que la saison cyclonique qui les sépare, voilà qui aurait pu sembler beaucoup. Et pourtant ! Ce ne sont pas moins de 8 mois que nous avons passés à explorer les cinq archipels de Polynésie Française en y parcourant presque 4’500 milles. Et depuis que nous avons quitté ce monde enchanteur, il y a deux mois déjà, nous avons déjà parcouru presque 2’000 milles, en passant par Suwarrow, les Samoa et les Tonga. C’est le moment de rejeter un coup d’œil à la carte que nous vous avions proposée, et vous verrez alors combien notre séjour Pacifique en devient ridicule. Mais l’horloge ne s’arrête pas : au moment de quitter les Tonga, nous sommes déjà mi-août, et il nous faut penser aux échéances qui n’attendent pas non plus. Aussi, lors de ces derniers mois, en plus des visites, bricolages, navigations et mondanités, avons-nous potassé les guides, les instructions nautiques et les cartes. Nous vous livrons ici le résultat de nos réflexions.

L’échéance finale, celle voulue par le budget, nous impose de boucler notre voyage autour de la planète dans deux ans environ. Impossible, donc (à notre grand regret), de passer une saison supplémentaire dans le Pacifique : il nous faudra passer l’année 2013 à traverser l’Océan Indien vers l’Afrique du Sud, et l’année 2014 à remonter l’Atlantique. C’est au plus tard en novembre 2013 qu’il nous faudra avoir quitté les Mascareignes (Maurice et La Réunion) car la saison cyclonique commence alors. En prenant en compte le temps de traverser l’Océan Indien (avec un éventuel arrêt aux Chagos), cela veut dire qu’il faut quitter l’est de l’Océan Indien en août 2013 au plus tard. Comme nous sommes en août 2012, la véritable question qui se pose est donc de déterminer notre itinéraire pour l’année à venir. Définissons les contraintes immuables : la saison cyclonique dans le Pacifique sud-ouest comme dans l’Indien sud-est s’étale de novembre à mai. Contrairement à quelques téméraires qui n’en font rien et dont nous ne sommes pas, mieux vaut dégager la zone : pas question donc de naviguer sous les tropiques à cette époque.

Pour les objectifs, maintenant : notre première priorité est de passer le maximum de temps en Nouvelle-Zélande, l’un des objectifs majeurs de notre voyage, et nous souhaitons l’explorer tant que faire se peut à bord de Fleur de Sel : les conditions de navigation y sont rudes et ce ne sera pas facile, mais l’accueil y parait chaleureux et les paysages majestueux. Deuxième objectif : bien que nous ne soyons pas des aficionados de l’Asie, il nous parait dommage de faire un tour du monde sans passer par le plus grand continent. De plus, l’Indonésie est le plus grand archipel du monde, c’est donc une destination toute indiquée lorsqu’on voyage à bord d’un bateau. Enfin, malgré quelques contraintes administratives, il s’agit d’une destination tout à fait fréquentable de nos jours. Et puis, il y a la Nouvelle-Calédonie, où je me suis un jour promis de me rendre à la voile. Il faut donc qu’on passe sur le “Caillou”. Comment, dès lors assembler les pièces du puzzle pour en faire un itinéraire cohérent ?

Revenons à août 2013 : l’Indonésie sera un point de départ parfait pour traverser l’Indien. Il nous faut donc y arriver vers le mois de juin si l’on veut pouvoir en profiter et l’explorer pendant deux mois – ce qui semble un minimum pour un pays constitué de 13’677 îles ! Notons que l’Indonésie elle-même n’est pas sujette aux cyclones car elle se situe au niveau de l’équateur (où l’effet de Coriolis est nul), mais en venant de Nouvelle-Zélande il faudra à un moment ou l’autre traverser la zone tropicale pour arriver à l’équateur. Comme la saison cyclonique se termine en mai, et qu’il faut éviter de monter au nord de 30°S avant cette date, cela nous donne un mois pour faire ce trajet.

Passons maintenant à la question épineuse : entre Nouvelle-Zélande et Indonésie se trouve ce que certains ont appelé “une cible de bonne taille, quelque soit l’échelle” – l’Australie. Un pays-continent, une île pratiquement aussi grande que le Brésil, et il faudrait effectivement le faire pour manquer cette cible en plein sur le trajet. Il y a quelques inconvénients, toutefois, à visiter ce pays : les formalités sont pénibles (il faut obtenir un coûteux visa et passer par la coûteuse quarantaine), et puis le coût de la vie y est élevé – vous aurez compris que passer en Australie nous coûtera cher… La route habituelle, pour contourner “Oz”, c’est le Détroit de Torres, que l’on pourrait franchir sans même faire escale en Australie, il est vrai que c’est une première option. Mais pour y arriver, la plupart des navigateurs parcourent la Grande Barrière de Corail, le plus long récif du monde. On y fait des escales, particulièrement aux Whitsundays, et on n’y navigue que de jour allant de mouillage en mouillage. Difficile de parcourir les 1’000 milles de récif en un mois, donc ! Et puis le Nord de l’Australie est une ménagerie peuplée de toutes sortes d’animaux intéressants, comme les méduses les plus mortelles du monde, ou comme les crocodiles qui rendent les annexes (dé)gonflables particulièrement vulnérables… A bien y réfléchir, nous ne savions plus bien si nous voulions toujours aller en Australie !

C’est pourquoi nous nous sommes intéressés à une alternative rarement envisagée et à propos de laquelle il n’existe que peu d’information : et si on contournait l’Australie par le sud ? La plupart du temps, c’est impossible, puisqu’on est à la porte des quarantièmes rugissants. Et on ne fait pas 1’600 milles contre le vent dans les quarantièmes – sauf si l’on est masochiste, ou britannique, ou mieux les deux. Mais il y a quelques mois pendant l’été, où le long de la côte les conditions semblent le permettre, plusieurs bateaux l’ont fait et ne semblent dire que du bien de ce trajet atypique : paysages superbes, accueil charmant des habitants peu habitués à avoir de la visite, etc. Voilà qui nous tente plus ! Certes, ici aussi la baignade semble un peu compromise : on risquerait de faire connaissance avec le grand blanc. Mais avec les températures plus fraîches, on est sans doute moins tentés et en tout cas moins frustrés.

Faisons maintenant les comptes : il semble possible de quitter Perth début mai 2013 et d’arriver à Bali en juin 2013, le tout sans risquer une rencontre cyclonique. La difficulté majeure du parcours dans le sud de l’Australie, c’est la traversée de la Great Australian Bight : cette immense baie ne présente pas le moindre abri sur 600 milles et il faut s’attendre à y croiser au moins un front. Soit. La période idéale pour traverser la zone est février-mars, mais on peut espérer qu’avril soit encore correct, quitte à attendre un peu la bonne fenêtre – ce qui nous permettrait d’utiliser le mois de mars 2013 pour explorer la Tasmanie, l’un des plus beaux terrains de jeux du pays “Down Under”. Jusque là, cette idée nous plaisait bien. Mais elle a une implication majeure, c’est que si on utilise une partie de l’été (austral) pour faire la côte sud de l’Australie, cela réduit d’autant le séjour en Nouvelle-Zélande qui est pourtant notre priorité. Conclusion : il faut qu’on traverse le plus tôt possible des tropiques vers la Nouvelle-Zélande, sans attendre le mois de novembre 2012. Il fera plus frais car ce sera encore le printemps, et la traversée risque d’être un peu plus musclée (mais de toutes les manières c’est la loterie, on risque toujours d’être secoués, parfois sérieusement, sur ce parcours). Mais au moins pourrons-nous arriver en Nouvelle-Zélande avant la horde (sauvage !) des autres “yachties”, et avoir atteint l’Ile du Sud au moment de Noël et du Nouvel An, c’est-à-dire les grandes vacances d’été pour les Kiwis. En bref, nous devrions avoir moins de monde partout, idée plutôt séduisante.

Au fur et à mesure que notre réflexion nous rapproche de maintenant, il s’avère évident que nous disposons de moins de temps que nous ne le pensions initialement pour parcourir le chapelet d’îles des Mers du Sud. Mais il est vrai qu’après un an sous les tropiques, nous nous réjouissons aussi à l’idée de goûter à nouveau aux climats tempérés, quitte à avoir un peu froid par moments. Les longues journées d’été, les couchers de soleil qui ne ressemblent pas à un clic d’interrupteur, les journées où l’air est limpide, l’idée de manger des fruits rouges, voilà les petits plaisirs qui nous attendent aussi. Et nous serons ensuite bien contents de retrouver les cocotiers, l’eau chaude, etc. En fait, nous aimons bien l’alternance de saisons ! En tous les cas, il nous faut pouvoir être prêts à faire route sur la Nouvelle-Zélande dès fin septembre ou début octobre, et si l’on veut passer par la Nouvelle-Calédonie, il faut donc nous y rendre sans tarder. C’est la raison pour laquelle nous avons fait nos formalités de sortie des Tonga directement pour Nouméa.

Nous avions déjà fait une croix sur les Fidji, qui se trouvent sur la route mais qui auraient demandé trop de temps pour qu’on puisse vraiment en profiter : ce n’est pas en une quinzaine de jours qu’on explore un archipel aussi vaste. Il faut pouvoir y consacrer 6 à 8 semaines, temps dont nous ne disposons pas. En plus les formalités n’y sont ni données ni rapides, donc aligner plusieurs centaines de dollars en y passant une journée à l’arrivée et une journée au départ n’est compatible ni avec notre planning ni avec notre portefeuille. Tant pis pour les bons petits curry indiens (la moitié de la population fidjienne est d’origine indienne). Nous avons en revanche failli succomber à l’appel du Vanuatu, tant les échos que nous en avons eu de toutes parts sont formidables. Mais ici encore les formalités sont plutôt chères, et en étant raisonnables, il n’aurait pas fallu y rester plus de 15 jours. Soit à peine le temps de faire deux ou trois îles, en allant vite. Mais si jamais nous abandonnons l’idée de passer par l’Australie du sud, le Vanuatu pourrait d’ailleurs être une alternative.

Voilà, donc, notre planning est bien arrêté désormais, et vous trouverez le détail de ce que l’on pense faire sur la page parcours de notre site (information qui intéressera ceux qui voudraient venir nous rendre visite – message : venez nombreux !) Et au pire si jamais nous accumulons du retard en Nouvelle-Zélande et que nous nous apercevons que nous serons trop tard en saison pour passer au sud de l’Australie, il sera toujours temps de passer par le nord, même si c’est au pas de course. En attendant, il vaut mieux prévoir des escales plus longues et un calendrier moins tendu, d’autant que nous ne pouvons pas consacrer 100% de notre temps au tourisme. Fleur de Sel a aussi besoin d’attention, et il nous faudra faire de l’entretien et quelques réparations, surtout en vue de la traversée vers la Nouvelle-Zélande. Tant pis, il faut faire des choix, nous en avons l’habitude, même si c’est souvent frustrant de passer juste à côté de contrées sans doute passionnantes. Mais dans un sens, tout ce que nous ne ferons pas cette fois-ci – et ce n’est pas peu de choses – sera matière à rêve et projets pour un hypothétique autre voyage ! Au cas où on ait la chance de pouvoir un jour réitérer une petite virée similaire…

3 Replies to “Et maintenant ?”

  1. Bonjour Heidi & Nicolas,
    Tout d’abord, je vous souhaite une très bonne année avec plein de nouvelles découvertes.
    Question, serait-il possible d’avoir un aperçu des coûts, des formalités et des difficultés de tous les pays que vous avez visités ?
    Merci et encore bcp de bons vents
    Philippe

  2. Salut les fleurs de sail !
    quelle judicieuse réflexion, mais je n’ai pas compris le parcours retenu pour finir ! En tout cas, l’important est d’arriver à Bali, île qui nous a enchantés lors du retour par avion (de terre). Et de vous régaler de Nle Z.
    Ici, l’automne se met en place doucement, le chauffage est déjà en activité dans la maison, et les bains de mer nous manquent affreusement. on se contente d’admirer vos photos, mais patience………les occupations ne manquent pas depuis notre retour, en particulier familiales, entre les enfants, pts enfants, et parents âgés ! à 60 ans, on est bien entourés et sollicités, pas de quoi s’ennuyer ! Kenavo ! christine

  3. > Et puis le Nord de l’Australie est une ménagerie peuplée de toutes sortes d’animaux intéressants, comme les méduses les plus mortelles du monde, ou comme les crocodiles …

    Sans compter les araignées et les serpents les plus venimeux du monde, ou les casoars qui ont un doigt en forme de poignard et peuvent éviscérer un homme (bon ça c’est à vérifier mais dans le doute, hein). Ils sont fous ces Australiens !!
    On vous attend de pied ferme en NZ en tous cas, ici pas de méduses, requins, crocodiles, serpents, araignées … juste des jolis oiseaux et des Pohutukawa trees !

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