Trois semaines à Sydney
Trois semaines à Sydney, ça semble beaucoup. D’ailleurs, c’est beaucoup, si l’on songe que nous avons consacré la période du 4 au 27 novembre à cette ville et ses environs, et ce d’autant plus si l’on se rappelle qu’en moins de 8 mois nous souhaitons faire une grosse moitié de la côte du continent. Et pourtant, ces trois semaines, si vite envolées, ne nous auront permis que de faire le strict minimum ! La ville est grande, et comme toute métropole elle regorge d’attractions, mais surtout, nous n’avons pas fait que du tourisme. Voici donc un aperçu de l’escale de Fleur de Sel dans la plus vieille et la plus célèbre des villes australiennes.
Sydney s’étend tellement loin que ce n’est pas dans le Sydney Harbour à proprement parler que nous avons passé la première semaine, mais dans l’entaille aux bras multiples qui se situe à une quinzaine de milles au nord. On y entre par Broken Bay, et l’on a ensuite accès à plusieurs plans d’eau. La Hawkesbury River au nord-ouest est parait-il superbe, mais elle nous est malheureusement interdite en raison du pont ferroviaire trop bas pour le mât. Nous avons donc exploré en premier la région du Cowan Creek, au sud-ouest, qui baigne le Ku-Ring-Gai Chase National Park, mais malheureusement à un moment où il a fait un temps que des locaux ont ensuite qualifié de “misérable”. Notons que dans la plupart des baies que nous avons visitées, l’autorité maritime du NSW met à disposition des corps-morts gratuits, mais limités à 24 heures. Après avoir passé une journée cloitrés dans le carré à attendre que la pluie cesse, nous avons donc fait quelques milles de l’America Bay jusqu’à Jerusalem Bay, et bien nous en a pris car le coin était tout aussi superbe, surtout à la faveur d’une éclaircie.
Nous sommes en fait dans un canyon inondé par la mer, et les falaises sont assez abruptes autour de nous. La roche, du grès jaune caractéristique de la région de Sydney, présente des formes et des motifs souvent fabuleux, et le tout est tapissé par une épaisse forêt sèche faite en grande majorité d’eucalyptus. Petit bémol cependant, car si les chemins de randonnée sont tout proches de nous sur la carte, aucun ne semble déboucher au bord de l’eau (ils sont en fait sur les crêtes) et on ne parvient pas à trouver où marcher. Nous faisons donc une promenade en bateau, en remontant jusqu’au fond du Smith’s Creek, l’un des bras de ce fjord. Au passage, alors que nous dépassons le petit village de Cottage Point, nous prenons un bon orage, et nous nous faisons copieusement arroser. Mais le soleil perce ensuite et les lumières sont alors très belles. Retour en fin de journée à Refuge Bay, voisine de America Bay, et nouvelle tentative pour trouver un sentier à terre, mais en vain.
Changeant notre fusil d’épaule, nous nous sommes alors rendus dans le Pittwater, le bras le plus au sud de Broken Bay. Les deux rives sont éminemment contrastées, puisqu’à l’ouest se situe le parc national tandis qu’à l’est on trouve la lisière de l’agglomération. En ce samedi, nous croisons pléthore de bateaux de régate, de croisière, à moteur ou à voile, chacun étant de sortie tant qu’il ne pleut pas. Nous mouillons devant le joli quartier résidentiel de Newport, où de belles voitures sont garées devant les maisons cossues. Dans ce haut-lieu du yachting, nous nous rendons chez plusieurs accastilleurs, à Newport, Bayview et Mona Vale, pour trouver de nombreux articles figurant sur notre liste. Il faut dire qu’après deux ans en Nouvelle-Calédonie, nous trouvons ici des produits différents et souvent moins chers. Alors on se lâche ! C’est un peu Noël avant l’heure… Au retour, nous passons encore par un supermarché, et après avoir bien marché toute la journée (mais en ville), nous sommes fourbus ce soir là. Nous allons donc nous reposer le lendemain, dimanche, dans un mouillage visiblement coté par les locaux : The Basin, mais la météo ne nous inspire pas encore pour une promenade. En revanche, le week-end plus encore qu’en semaine, la VHF crépite sans arrêt, avec en plus du traffic commercial habituel tous les plaisanciers qui s’inscrivent et se déinscrivent du programme de veille (log in, log off), le tout coordonné avec plus ou moins de bonheur par Marine Rescue NSW (il faut dire que la topographie doit compliquer un peu la propagation des ondes…)
Mais bref, ce n’est que le lendemain, lundi, alors qu’il fait maintenant grand beau temps, que nous laissons Fleur de Sel devant le village un peu hippie de Great Mackerel Bay, pour trouver enfin un chemin. Ce fut superbe. Nous avons découvert la forêt sèche (pourtant il n’avait pas arrêté de pleuvoir), les eucalyptus et leur vert grisâtre ou métallique, et la terre sablonneuse et très très claire. Nous avons atteint quelques superbes points de vue sur les bras de mer que nous avions sillonnés, et dans lesquels nous nous repérions bien à présent. Quant aux traces d’art aborigène parsemés ici ou là, en revanche, il faut bien avouer qu’il n’y a ou qu’il ne reste pas grand chose. Après cette promenade en revanche, nous avons subi quelques déconvenues : d’une part Fleur de Sel semblait avoir dérapé, mais dans une direction perpendiculaire au vent (!) ; alors des pêcheurs ont-il déplacé notre mouillage, et pourquoi ? Ensuite, l’annexe s’est crevée sur les coquillages coupants du quai sur lequel nous l’avions amarrée, et heureusement qu’il faisait bien sec, nous avons procédé à une réparation illico. Et puis surtout Heidi s’est fait piquer par une tique, enlevée heureusement assez vite. Bref, ce soir-là nous avons bien dormi après nous être déplacés vers Ettalong, à l’entrée du quatrième bras, au nord de Broken Bay (la suite, le Brisbane Water, n’étant encore une fois pas accessible à cause d’un pont).
Le lendemain il faisait toujours beau, et le vent s’est établi au nord, si bien que nous en avons profité pour faire le saut de 15 milles jusqu’au fameux Port Jackson, l’immense plan d’eau qui baigne le coeur de Sydney. Chemin faisant, nous sommes passés devant les Northern Beaches, terminant par celle de Manly, avant de franchir les célèbres Heads, les deux grands caps encadrant la passe d’entrée. L’AIS, déjà sollicité dans le Pittwater, se met désormais presque à scintiller. Les bateaux vont dans tous les sens, et vite ! Il faut particulièrement faire attention aux ferries, qui ont la priorité absolue sur tout le monde, et c’est une aide immense que de les détecter avant qu’ils n’apparaissent à 20 noeuds au détour d’une pointe. Heureusement, pendant une après-midi de semaine, les voiliers et speedboats sont moins nombreux que le week-end. Tournant au sud à l’entrée, nous nous dirigeons vers le centre, et si l’on voit déjà depuis longtemps les tours du CBD (Central Business District), il nous faut attendre en revanche de passer Bradley’s Head pour découvrir le célèbre opéra, semblant flotter sur le port devant le Harbour Bridge. Un instant mythique pour l’équipage, tout heureux d’arriver là à la voile.
Ne souhaitant pas trop en faire, et souhaitant profiter de la vue, nous décidons ce soir-là de mouiller dans l’endroit le plus improbable, celui dont un guide dit que la plupart des gens s’imaginent que c’est interdit alors qu’il n’en est rien, et dont d’autres nous diront ensuite que c’est un mouillage à plusieurs millions de dollars : dans Farm Cove, au sein du jardin botanique, et justement au pied de l’opéra ! Certes, ça bouge bien en heure de pointe, lorsque le ballet des ferries bat son plein, mais la nuit fut néanmoins bonne. En revanche, si la vue le soir était superbe au soleil couchant, au petit matin la pluie a fait son retour, et nous poursuivons donc sous un ciel plombé vers un mouillage plus permanent, en commençant par passer sous le pont.
Les indications pour rejoindre Rozelle Bay pourraient être les suivantes : à l’entrée à gauche, puis à la quatrième pointe à droite, continuer jusqu’au pont, puis première à gauche, première à droite, de nouveau première à gauche, passer sous un autre pont (le ANZAC Bridge), et vous y êtes. Inutile de préciser que si le vent peut arriver dans cette baie, en revanche il n’y a pas une vague. C’est l’un des rares mouillages autorisés pour une longue durée, mais la zone délimitée par des bouées jaunes est étroite et l’on met donc peu de longueur de chaîne. La seule gêne, en fait, sera celle des rameurs, qui font peu de vagues, mais qui s’entraînent bruyamment, tous les soirs (vers 19h) et tous les matins (vers 5h, et c’est ce qui est le plus pénible). Entre la Blackwattle Bay voisine et notre mouillage, nous ne sommes pas plus d’une dizaine ou d’une douzaine de voiliers visiteurs. Tous les yachties étrangers ou presque choisissent le Queensland et la Grande Barrière de Corail, et depuis notre arrivée, nous n’avons donc croisé qu’une poignée d’autres voiliers sur la route du sud, mis à part quelques Australiens.
A partir de Rozelle Bay, nous ne sommes qu’à une demi-heure à pied environ du centre-ville, et moins si on prend le train ou le bus. Nous nous lançons donc à l’assaut de la ville, pour faire évidemment un peu de tourisme. Nous allons voir l’opéra de plus près, nous traversons le pont à pied, ce qui nous donne une vue magnifique sur le port. Nous flânons dans le quartier historique The Rocks, du côté de Circular Quay (le quai des ferries, et qui est maintenant… carré), et dans les Royal Botanic Gardens au milieu duquel trône le petit château Government House, ancienne demeure du Gouverneur, et maintenant résidence de la reine lorsqu’elle se rend à Sydney. Du côté de Darling Harbour nous découvrons un secteur du port plus ludique et divertissant, et le quartier attenant est en rénovation majeure. Nous passons aussi par le Chinatown, et par le Paddy’s Market aux multiples produits, et nous allons déjeuner au Fish Market, le plus grand de l’hémisphère sud, et un repaire d’asiatiques et d’ibis (les premiers aussi bien en tant qu’employés et en tant que clients plus que fidèles, les seconds bien décidés à vous voler un morceau de fish and chips si vous relâchez votre attention !). Et bien entendu, au milieu de tout cela, nous arpentons le CBD. Cela fait longtemps que nous n’avions plus été dans une grande ville avec tant de tours de verre et d’acier, au milieu desquels on trouve heureusement encore des édifices plus anciens, comme le Town Hall, le General Post Office ou le superbe Queen Victoria Building.
Dans le centre commerçant, et particulièrement dans et autour de la George Street, nous faisons aussi beaucoup d’emplettes. Ici encore, cela fait longtemps que nous n’avons pas eu autant de possibilités pour faire nos achats. Pêle-mêle, nous trouvons des chaussures de marche (après avoir recollé 3 ou 4 fois la semelle des anciennes, nous les avons décrétées mortes), du rembourrage pour les coussins du carré, un filtre polarisant pour l’appareil photo, des composants électroniques, etc. Nous nous offrons aussi des haut-parleurs Bluetooth pour pouvoir écouter de la musique à bord, car les précédents sont morts. Nous avons aussi rendez-vous à l’Apple Store qui nous changera la carte mère et la batterie du Mac sous garantie, super ! Et puis nous faisons faire de nouveaux matelas pour le lit, les précédents s’écrasant ou bien sous le poids des années ou sous le nôtre. Le plus cocasse a certainement été le transport à pied pendant 45 minutes à travers la ville… Mais bref, on peut dire que l’on poursuit nos achats de Noël, et les cartes de crédit chauffent !
Nous avons aussi du monde à voir à Sydney, et nous allons donc rendre visite chez elle à notre amie Lily, rencontrée aux Tonga et revue en Nouvelle-Zélande. Nous découvrons ainsi le nouveau quartier chinois de Sydney, du côté de Burwood, et elle nous emmène ensuite à un festival thaï qui a lieu à Parammatta, le deuxième centre de Sydney, quelque peu en amont du port. Nous retrouvons aussi Béatrix, le lendemain de son arrivée pour sept mois en Australie sur un visa vacances-travail, et avant de dîner à bord, nous visitons ensemble le National Maritime Museum qui retrace bien l’histoire méconnue des explorations européennes de l’Australie et celles des traditions maritimes des Aborigènes, ainsi que l’histoire de l’immigration qui s’est faite essentiellement par voir de mer. Pour terminer, plusieurs bateaux sont exposés : un surfboat de sauvetage balnéaire, le classique Britannia, et le Blackmores First Lady – de la même taille que Fleur de Sel ! – de Kay Cottee, la première femme à faire le tour du monde en solitaire et sans escale.
Après une semaine de mouillage, et après un petite remontée un peu en amont du port, nous repassons sous le pont car nous nous offrons quelques jours au mythique Cruising Yacht Club of Australia – “The home of the Sydney to Hobart yacht race”. Fleur de Sel dénote beaucoup parmi les coursiers rutilants alignés sur les pontons, et ce d’autant plus que nous sommes amarrés juste devant le club house. Pourtant, être au ponton nous permet de réaliser quelques excursions touristiques un peu plus lointaines, en laissant le bateau en toute sécurité. Prenant un tour organisé, avec départ tôt le matin, nous avons filé vers la Hunter Valley. C’est sans doute la région viticole la plus importante du NSW, et tout comme nous l’avions fait il y a 9 mois dans la Yarra Valley près de Melbourne, c’est une bonne occasion d’aller faire des dégustations sans se préoccuper de la conduite. Nous sommes revenus un peu déçus des vins rouges et particulièrement des syrahs bien moins construits que ceux du Victoria ou d’Australie méridionale. En revanche, la surprise pour nous a été sur les vins blancs et rosés et nous avons pu revenir à bord en ayant déniché quelques bonnes bouteilles, et en ayant découvert un nouveau cépage au passage : le verdelho.
Par ailleurs, Pepo, qui était déjà venu nous voir à Coffs Harbour, profite d’une visite à des amis non loin de Sydney pour passer une nouvelle journée avec nous. Il nous conduit dans les Blue Mountains, cette portion du Great Dividing Range (la cordillère australienne) située juste à l’ouest de Sydney. Nous découvrons donc les petites villes de Leura et Katoomba, la première un peu kitsch et bobo, la seconde véritable pôle touristique peut-être un peu trop en vogue, toutes deux installées à un millier de mètres d’altitude. De manière surprenante, ces montagnes sont en fait principalement un plateau peu accidenté en soi, mais le relief s’y inscrit “en négatif”. En effet ce sont surtout les canyons qui y sont spectaculaires, avec des escarpements se précipitant plusieurs centaines de mètres plus bas, les falaises de grès jaune contrastant avec la forêt d’eucalyptus. Ce sont d’ailleurs ces arbres qui dégagent de fines gouttelettes d’essence grasse sous l’effet de la chaleur, et qui provoquent ainsi une légère brume bleutée dans le lointain. Nous apprécions donc le panorama sur les Three Sisters vues depuis Echo Point (mais beaucoup de monde et parking hors de prix), et surtout ensuite la vue depuis Wentworth Falls. Au retour, nous réalisons combien nous étions chanceux d’être en altitude, car il faisait 42° à Sydney !
Nous continuons par ailleurs de voir du monde, puisque nous buvons un verre avec Max, un autre voileux de La Trinité et installé à Sydney depuis plusieurs années, régatier passionné et qui participera à sa troisième Sydney-Hobart cette année. Nous revoyons aussi Samantha et Bronwyn, soeurs que nous avions aussi rencontrées aux Tonga. Après un verre à bord pour leur faire découvrir notre environnement, c’est elles qui nous guident vers un pub branché et très sympa dans le quartier huppé de Double Bay. A ce stade, notre séjour à Sydney nous plait beaucoup, mais tout autant pour le portefeuille que pour le calendrier, nous savons qu’il ne faudrait pas trop qu’il dure. Il nous faut cependant encore prendre livraison de quelques affaires. Tout d’abord de diverses pièces pour le bateau que nous avions commandées, et que Lily a accepté de recevoir pour nous. Nous retournons donc lui rendre visite, mais le dernier colis, venant de Nouvelle-Zélande, n’est malheureusement pas arrivé, tant pis. En revanche, avant de quitter le yacht-club, nous faisons livrer des provision par les supermarchés Coles. En plus des multiples produits que nous avons achetés ici ou là et transporté en sac à dos, ce sont cette fois-ci 36 bouteilles d’eau, 24 bouteilles de bière, et 12 ou 15 litres de jus de fruits, entre autres, qui atterrissent à bord sans que nous n’ayons à les porter. C’est magique !
Vient alors le moment de quitter le ponton, et nous voguons vers la sortie, sans toutefois franchir les Heads, puisque nous bifurquons à présent vers le Nord, dans Middle Harbour, pour quelques jours avant que la météo ne nous devienne favorable. Ayant pris un peu de marge, nous patientons une demi-heure et à l’heure dite, lorsque le Spit Bridge s’ouvre (ce qui coupe la circulation automobile sur un axe majeur), nous le franchissons vite avant qu’il ne se referme. Nous découvrons alors un joli plan d’eau bien protégé, sans ferries, et entouré de nombreuses villas. Ceux qui habitent là doivent avoir un cadre de vie vraiment superbe… Nous profitons nous aussi de cette nature urbaine (ou de cette ville naturelle) en séjournant successivement dans Bantry Bay et dans Sugarloaf Bay, entourées de forêt, mais malheureusement toujours dérangés à 5h par des rameurs…
Puis, anticipant enfin une météo favorable pour le lendemain, nous repassons alors le pont, et nous nous dirigeons ensuite vers Manly où, malheureusement tous les corps-morts publics sont pris. Nous nous rabattons sur Quarantine Bay, située non loin, et même encore plus proche de North Head où nous souhaitons nous promener. La balade est en fait plus courte que ce que nous escomptions, mais elle n’en sera pas moins superbe. Du haut des falaises, nous dominons l’entrée du port, avec en arrière-plan les tours du centre, tandis qu’un paquebot sort. Le soleil déclinant et le vent soutenu rendent le spectacle plus intense. Au passage, nous nous arrêtons un instant sur le mémorial aux soldats australiens, et c’est l’occasion de vous inviter à en apprendre plus sur l’incroyable intensité des efforts de guerre entrepris par les Australiens en 1914-18 et 1939-45. Je ne me permettrai pas une énième digression qui serait trop longue, mais il serait dommage de ne pas réaliser que parmi les belligérants de la Première Guerre Mondiale, ce fut l’Australie qui a perdu la proportion la plus importante de sa population au combat. Sachant que l’essentiel des batailles avaient lieu à l’autre bout du bout du monde, et qu’ils ne s’agissait que de volontaires, c’est tout simplement incroyable, et on comprend l’étendue du traumatisme encore présent aujourd’hui, et qui se cristallise autour du souvenir de la boucherie de Gallipoli…
A la faveur du vent du nord, nous regagnons la mer ouverte le lendemain pour un petit trajet d’un peu plus de 20 milles. Nous passons au pied des falaises de grès sur lesquelles sont perchés les beaux quartiers, nous passons devant la célèbre plage de Bondi, puis à l’ouvert de Botany Bay, le site où James Cook avait atterri et pris possession du nouveau territoire pour la couronne anglaise, et où se trouvent aujourd’hui l’aéroport, le plus gros du port de commerce, des usines et des raffineries. Encore un peu plus au sud, nous rentrons dans Port Hacking, la dernière des baies qui baigne l’agglomération de Sydney. La rive sud est en grande partie le Royal National Park, le deuxième plus ancien parc national au monde (après Yellowstone), et l’intérieur du ria est, parait-il, de toute beauté. Ici, ce n’est pas un pont, mais une ligne électrique qui nous empêche cependant de remonter en amont, et nous venons mouiller devant la banlieue balnéaire de Cronulla. Nous pouvons y compléter notre avitaillement, et dans l’espoir que notre dernier colis soit arrivé, Heidi retourne en train chez Lily, mais en vain. La poste kiwie ne semble être ni particulièrement efficace ni fiable, mais tant pis, ce n’est pas grave, nous n’allons pas nous éterniser pour cela, et nous demandons à Lily de nous le faire suivre plus loin. Ce sont les joies de la logistique sur cible mobile.
Pour la deuxième fois depuis notre arrivée à Sydney, nous subissons un passage de front particulièrement spectaculaire. Avant, le vent souffle du nord-ouest, apportant un air suffocant de chaleur et de sécheresse (jusqu’à 42°, et 20% d’humidité seulement), et la rafale de sud-ouest arrive brutalement, sans pluie, et fait tomber instantanément la température de 20° au moins, avec une humidité plus habituelle, ce qui donne d’un coup une sensation de fraîcheur intense. Pour nous, c’est le signal. Cela signifie que 24 heures après, les conditions seront bonnes pour nous aventurer au dehors et pour nous attaquer à la côte sud (avec un vent d’est puis nord-est puis nord). Alors, après une bonne nuit à Jibbon Beach, en route !