Bonne année avec June en janvier !
Bien que nous ayons déjà adressé nos meilleurs vœux aux lecteurs de nos Lettres du Bord, nous profitons que le mois de janvier ne soit pas encore terminé pour vous souhaiter à tous une bonne année 2014.
2013 s’est terminée pour nous sous un grand soleil, tout d’abord avec une rapide escapade de deux jours à peine à Noël. Nous avons profité du confort de l’Hôtel Tiéti à Poindimié, au bord de la plage. Et le 25 décembre, pour nous remettre du bon repas de fête, nous avons fait le tour de la superbe vallée de la Tchamba. C’est Miss Twinguette qui a vaillamment franchi une demi-douzaine de gués (heureusement le temps était sec) pour nous permettre d’admirer les paysages bucoliques de cette vallée reculée de la côte est. Un régal pour les yeux. C’était notre deuxième équipée dans le Nord, après un week-end début décembre dans la région de Koumac. Nous y avions atteint Boat Pass, le canal qui marque l’extrémité de la Grande-Terre, et qui la sépare de quelques îlots du Grand Nord.
Le soleil était toujours au rendez-vous quelques jours plus tard, les derniers de l’année, lorsque nous avons emmené Fleur de Sel en vadrouille. Cap sur l’Ile Ouen, un intense mélange de terre rouge et de verdure luxuriante, le tout ceinturé de récifs turquoise. Pour nous ça a été l’occasion de nous remettre à l’eau en allant explorer quelques beaux récifs. Les poissons multicolores sont toujours aussi passionnants à observer. Et évidemment, par deux fois, nous nous sommes fait surprendre par un aileron blanc du lagon. Inoffensifs, a priori, mais ça reste des requins… Ces journées tranquilles sur le lagon nous ont permis de bien décompresser, et à Fleur de Sel de retrouver une coque propre, car nous avons bien frotté ! Ses beaux dessous rouges étaient colonisés par les algues, coquillages, et elle avait bien besoin d’un carénage.
Janvier, en revanche, est d’un autre acabit. Nous entrons dans le vif du sujet, en ce qui concerne la saison estivale. Eau chaude (28° dans le lagon), évaporation et convection accrues, vents d’ouest à l’équateur, anticyclone ayant déménagé vers la Nouvelle-Zélande, tous les ingrédients sont réunis : voici la saison chaude et humide, qui est surtout la saison cyclonique. La moiteur est bien moins agréable que lors des intersaisons. La pluie est plus fréquente, avec de beaux déluges souvent brefs mais intenses. Et puis nous voici de nouveau à étudier la météo très régulièrement. Nous surveillons les situations bourgeonnantes.
Et déjà avant le milieu du mois, alors que le cyclone Ian matraque les Tonga (pression centrale de 930 hPa et vents moyens de 110 nœuds, soit 205 km/h), une perturbation aborde les longitudes proches de la Nouvelle-Calédonie, et les modèles laissent présager le développement d’une dépression. Au début, les prévisions divergent : les modèles australiens, américains et européens ne sont pas d’accord. Mais au fur et à mesure que les jours passent, ça se précise, et elle semble se diriger droit sur la Calédonie ! Nous essayons de déterminer l’intensité du système lorsqu’il passera au plus proche, afin de savoir quel sera le pire scenario. Le service météo des Fiji, responsable de la zone, nomme la dépression : son petit nom sera June. Quel drôle de nom pour une tempête de janvier !
Autre anomalie, contrairement aux récits de cyclones que j’ai pu lire, ce n’est pas le calme avant la tempête. Toute la semaine, le vent aura soufflé à 20-25 nœuds avec rafales à 30. Et au moment de prendre la décision clé, j’estime que ça devrait aller, qu’il n’y a pas besoin d’aller se mettre à l’abri dans la mangrove. L’amarrage n’y aurait pas été aisé par ce vent, d’autant qu’en semaine je suis seul à bord. Mais surtout, et c’est le seul critère à prendre en compte, la dépression semble rester maniable et ne pas présenter de réel danger pour nous.
La Calédonie passe en pré-alerte cyclonique le 17 janvier à 15h, et le Nord passe même en alerte cyclonique orange, mais pas le Sud, et nous ne passerons heureusement pas en alerte rouge : il ne s’agit pas d’un véritable cyclone, mais seulement d’une tempête tropicale. Les prévisions vont de 30 à 55 nœuds, et nous subirons finalement une quarantaine de nœuds avec rafales à près de 50.
Il m’est donc possible de récupérer Heidi avant que le vent ne forcisse trop, et Fleur de Sel étale d’abord le coup d’Est sur son corps-mort, bien protégée sur la côte ouest. Le vent mollit ensuite dans la nuit de samedi 18 au dimanche 19, pour revenir du Nord-Ouest à 4h du matin. Vers 5h, nous allons alors mouiller à Nouville, de l’autre côté de la Petite Rade de Nouméa, où nous sommes parfaitement protégés. En revanche, le vieux gréement Maryvonne dérape et va s’échouer en épargnant miraculeusement tous les autres bateaux ! Enfin, dans la journée du dimanche, le vent mollit progressivement. Le soir ce n’est plus que de la vieille histoire pour nous. C’est au tour des Néo-Zélandais d’être visés par June, qui a de beaux restes pour eux.
Depuis, le temps reste souvent chaud et lourd, et nous continuons à surveiller la météo, car les conditions restent propices au développement d’autres tourbillons. Mais où iront les balles perdues ? Des Fiji à l’Australie, tout est possible, en attendant que la vaste zone dépressionnaire qui stationne du côté des Iles Salomon se décale. Peut-être d’ici une semaine ou deux ? Ça nous permettrait alors de respirer un peu !
Heureusement, June n’était qu’une petite dépression, rien de dramatique pour les Calédoniens habitués à cette saison qui revient année après année. Espérons seulement que rien de plus sérieux ne viendra nous frapper d’ici avril, lorsque la saison se terminera. En tous les cas, avec un nom comme ça, June ne voulait sans doute pas nous souhaiter une bonne année, ou alors c’était un poisson d’avril !
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Petite addition pour ceux qui veulent en savoir plus : Météo-France a réalisé un bon bilan du passage de June, disponible à l’adresse http://meteo.nc/actualites/378.