Le tricot shetlandais
La traversée de Fair Isle aux Shetland s’est passée sans encombres, malgré un courant important. Délaissant la côte est, nous optons pour la côte ouest, plus pittoresque, malgré le petit front qui doit passer peu après notre arrivée. En conséquence, abandonnant l’idée d’un mouillage à St. Ninian’s Isle, nous remontons directement jusqu’à Scalloway, citée endormie, port de pèche, et première capitale des Shetland. Un château délabré trône au-dessus du port. Nous profiterons du beau temps pour faire notre première journée portes-ouvertes (lessive intégrale et séchage au vent…)
Le lendemain, nous retournons dans le sud de l’île en bus, afin de visiter l’immanquable Jarlshof, site archéologique tout simplement hallucinant. L’endroit, tout au sud de Mainland, a été habité sans discontinuer pendant 4000 ans. On y trouve donc des vestiges de l’âge de pierre, du bronze, de fer, puis des habitations vikings, médiévales et enfin un manoir des Stewart. Le tout, ensablé sauf le manoir, a été mis au jour par une tempête à la fin du XIX° siècle, et soigneusement conservé depuis. La personnalité du caissier-guide, accueillant et chaleureux, ne gâche rien non plus !
Au retour, nous en profiterons pour passer par Lerwick, la capitale actuelle, et bourg bien plus grand que Scalloway. La cité ne manque pas de caractère, et nous en faisons le tour en ne manquant pas le Clickimin Broch, maison ronde fortifiée du début de notre ère. La ville est bien achalandée, mais nous retournons à Scalloway, où nous sommes un peu plus au calme.
Du côté de l’ouest, nous serons surtout plus à même de remonter la côte sauvage. En tricotant. Pas la laine, ça c’est les Shetlandais qui le font très bien. Ils sont célèbres pour ça, d’ailleurs, avec des motifs qui datent aussi de près de 2000 ans. Non, pour nous ça a été contre le vent, toujours du nord, contre nous. Alors nous avons louvoyé, un bord au large, un bord à terre, histoire d’avancer quand même. Et le moteur nous a bien aidée par moments. Au près, on n’avance pas vite, et nous n’avons donc pas eu beaucoup de temps pour explorer les îles à pied.
Mais on a pu admirer la côte, de plus en plus sauvage à mesure que l’on remonte vers le nord. Les falaises de rouges de Papa Stour, puis les falaises d’un noir austère au nord-ouest de Mainland. Puis Yell, entourée de passes où le courant s’engouffre avec violence (près de 6 noeuds de chaque côté, s’il vous plait). Et enfin Unst. Nous avons passé une nuit dans son seul abri de la côte ouest, rouleur au possible, mais dans un cadre superbe. Quand au clou du spectacle, ce fut sans aucun doute la pointe nord de l’archipel, couronnée du phare de Muckle Flugga. Certaines falaises y sont visibles depuis très loin, reconnaissables à leur blancheur. De la neige ? Un peu tard en saison… Du calcaire ? Pas vraiment la mode par ici. Non, du guano. Eh oui… Mais le guano de nuées d’oiseaux blancs eux aussi. Une vision hallucinante, au bout du monde. Vous en jugerez par vous-même.
Mais voilà, nous étions pressés par le temps, une dépression étant annoncée 2 jours plus tard. Soit nous partions sans tarder, soit nous restions coincés une semaine. Nous avons donc enchaîné directement vers Bergen, de l’autre côté de la Mer du Nord, sans autre forme de procès pour Muckle Flugga. Une traversée sans encombre, vent de travers, force 3 à 5, et par relativement beau temps. Juste quelques plateformes pétrolières et quelques tankers à éviter au passage… Mais au global un temps record de 32 heures pour parcourir les 180 milles, soit plus de 5,6 noeuds de moyenne. On n’a pas chômé, même si ça secouait un peu dans la banette ! A bientôt pour plus de détail sur la partie scandinave de notre croisière, qui commence maintenant…