Chez Cook, Tasman & Cie
Lorsque nous quittons Milford Sound, par un peu moins de 45°S, c’est une longue étape côtière qui nous attend. Elle aurait pu être plus difficile qu’une traversée au large, car il y a potentiellement des pêcheurs, et le vent est influencé par les montagnes, les vagues par le talus continental. Bref, il y a des jours où ce pays est des plus inhospitaliers, d’autant qu’aucun abri ne s’offre à nous avant d’atteindre l’extrémité de l’Ile du Sud, par presque 40°S. Sur la carte, on peut repérer deux ports, Greymouth et Westport, mais ce sont des rivières dont les barres d’entrée peuvent être hasardeuses, surtout lorsque la marée, la houle et la pluie se concertent pour en faire un véritable enfer. On nous a fortement déconseillé de nous y aventurer : même des chalutiers habitués des lieux viennent s’y abîmer régulièrement, et un guide indique avec un humour quelque peu britannique que si le temps est très calme et que nous sommes à l’article de la mort, alors on peut considérer cette éventualité… Non, le seul arrêt aurait pu être à Jackson Bay, une cinquantaine de milles au nord de Milford Sound. Nous avons envisagé fortement de nous y arrêter, pour découvrir – ne serait-ce-que quelques heures – un endroit hors du commun : terminus de la route qui descend la côte ouest, petit port de pêche, avec parait-il un snack qui fait de bons casse-croûtes.
Mais voilà, le temps nous était tellement favorable que nous avons préféré continuer. Il faut dire qu’au moment où nous arrivions au niveau de Jackson Bay, le vent nous poussait bien, et devait durer encore un peu, alors nous en avons profité. Le lendemain, en revanche, il nous a abandonnés pour deux jours, après nous avoir permis de faire presque la moitié du chemin. Bien que nous ayons dans un premier temps tenté de progresser autant que l’on pouvait à la voile, il a fallu se résigner à brûler du mazout. A deux nœuds, parfois moins, Fleur de Sel progressait gentiment sur une mer d’huile, jusqu’à ce qu’Eole tente une apnée prolongée. Mais comme la météo, incertaine au début de la traversée, nous confirmait peu à peu qu’un cyclone tropical qui se trouvait sur la Nouvelle-Calédonie finirait sa course sur la Nouvelle-Zélande, nous avons préféré éviter de nous attarder en chemin.
La navigation fut donc relativement peu passionnante, mais nous avons été récompensés par de jolis coups d’œil. Des dauphins d’abord, venus nous accompagner de temps à autre. Les albatros, aussi, virevoltant d’abord dans le reste de vent, et que l’on voyait ensuite posés sur l’eau à attendre – comme nous – le prochain souffle. Mais surtout le relief de la côte ouest est spectaculaire. A Milford Sound, évidemment, dont on vous a déjà conté le grandiose et la superbe. Mais à la sortie du fjord, le paysage est également montagneux au possible, avec de multiples chaînes et sommets, certains enneigés. Immanquable au milieu des autres, le lendemain ce fut le Mt Cook qui accrocha notre regard plus que tout autre. Du haut de ses 3’752 mètres, et épaulé par son compère Mt Tasman (3’497m), il domine les Alpes du Sud, à peu près comme le Massif du Mt Blanc se démarque du reste de nos Alpes européennes.
Les nuages sont cependant venus faire leur apparition, si bien que le plus souvent nous ne voyions que les pieds de la chaîne, ou certains sommets puis d’autres. Mais alors que le soleil déclinait, un peu de magie se produisit et nous fut dévoilée la chaîne dans son ensemble, rosissant au crépuscule. Descendant des sommets dorés, on pouvait apercevoir des glaciers, et parmi eux la longue langue du célèbre Fox Glacier. Les albatros virevoltaient encore devant cette toile de fond, tandis que les dauphins manquèrent un peu de ponctualité, ne venant danser devant le plus haut sommet de Nouvelle-Zélande qu’une fois la lumière trop faible pour pouvoir prendre des photos. Il n’empêche que ce soir là, nous avons-nous-même rayonné aussi, de bonheur, à la vue de ce spectacle qui n’est pas donné à beaucoup. Bien qu’éphémères, ces moments resteront longtemps gravés dans nos mémoires, marquées par tant de beauté et d’harmonie.
Cette longue remontée de la côte ouest s’est terminée par les falaises calcaires du Cape Farewell, prolongées par l’incroyable Farewell Spit, langue de sable et de dunes qui s’avance une quinzaine de milles en mer. Cette pointe est ainsi nommée car lors de son premier voyage, c’est là que Cook quitta la Nouvelle-Zélande, après en avoir fait le tour et l’avoir cartographiée, étudiée et finalement découverte ou presque. Presque, car c’est Abel Tasman, plus d’un siècle auparavant, qui l’avait mise sur la carte. Il n’en avait vu que peu avant de poursuivre son voyage, mais la baie dans laquelle nous entrons alors est celle où il atterrit lors de sa découverte : Tasman Bay. Le courant de marée sortant du Détroit de Cook et de la baie, venant se frotter aux hauts-fonds sablonneux de l’extrémité du Farewell Spit produit d’importants remous, et par mauvais temps il vaut mieux donner un large tour à cette région malsaine. Mais dans notre cas, le vent tant attendu commence seulement à se réétablir, nous permettant de parcourir les derniers milles à la voile, sur eau plate, et avec une jolie brise. Rien à redire !
L’ancre est ensuite venue se loger dans les fonds sableux de la Torrent Bay, une jolie anse bien protégée aux abords immédiats du Abel Tasman National Park (oui, on a parfois l’impression que tout s’appelle ou Cook ou Tasman, mais on préfère ça aux Nelson et autres Wellington, et puis c’est finalement un peu similaire aux O’Higgins chiliens et aux San Martin argentins). Ce parc n’offre pas de paysages particulièrement spectaculaires ou grandioses, mais ce sont de belles collines tapissées de belles forêts, bordées de belles criques sablonneuses et parcourues par de beaux sentiers de randonnée. C’est donc une destination particulièrement courue, que ce soit à pied ou en kayak. Nous avons surtout trouvé que l’endroit est reposant, avec bien moins de sandflies qu’au Fiordland (mais il y en a tout de même), un bon mouillage, et de jolis chants d’oiseaux. Finalement la seule chose que l’on y a déploré, c’est le ballet des bateaux-taxis pendant la journée, qui viennent déposer et récupérer touristes, marcheurs, kayakistes, et même locaux tout au long de la journée. Bien que la vitesse soit limitée dans la baie, ils sont nombreux à la bafouer allègrement, faisant danser les bateaux au mouillage avec leur sillage. Dur, dur, le retour à la civilisation. Et nous ne sommes même pas encore en ville !
Après deux jours passés à Torrent Bay, à randonner dans les alentours, à nous reposer, même à nous baigner de nouveau, il nous faut penser à nous mettre à l’abri. Les restes du cyclone viendront en effet nous rendre visite, et c’est l’occasion de nous rendre justement en ville, à Nelson. Après deux mois passés en autonomie ou à peu près, du nettoyage, du rangement, de l’approvisionnement ne nous ferons pas de mal. Et une vingtaine de milles plus loin, au fond de la baie, nous franchissons l’entrée du port, protégé par une immense langue naturelle de galets, et sur laquelle est installé l’ancien phare. Nous amarrons Fleur de Sel dans la marina et nous découvrons de nouveau le plaisir de l’électricité à volonté, de l’eau (froide et chaude) à volonté, des magasins à portée de pied ou presque.
Coup de chance, alors que nous nous élançons faire des courses, nous retrouvons nos copains Lizzy et Colin, du Pacific Bliss, rencontrés aux Marquises et aux Tuamotu, et revus brièvement à Opua. Leur voyage a pris une tournure inattendue, puisqu’au lieu de le terminer en Australie avant de rentrer en Angleterre comme ils le projetaient, ils sont maintenant en train de s’installer à Nelson pour de bon ! Nous aurons le plaisir de boire un verre avec eux l’un des soirs suivants, mais sur le coup, ils nous prêtent même leur voiture, si bien que nous en profitons pour faire un énorme plein de victuailles sans avoir à les porter.
Décidément, ce sont les retrouvailles, puisque nos amis Dana et Chris de Kind of Blue sont aussi dans le coin, mais en camping car. Ayant laissé leur bateau à Tauranga pour l’été, afin de retourner à New York, ils passent un mois sur la route en Nouvelle-Zélande avant de reprendre la mer, et ils passent par Nelson pour nous rendre visite. Leur projet à eux aussi est chamboulé, car au cours de la soirée que nous passons ensemble, ils nous annoncent que Dana est enceinte ! Alors qu’un déluge s’abat sur nous, nous prenons l’apéro à bord avant d’aller nous offrir un dîner au restaurant. Ce sera une très bonne soirée, car ça nous fait plaisir de revoir ces deux jeunes que l’on avait rencontrés à Suwarrow et revus aux Samoa et aux Tonga.
Et puis, le soleil revient sur Nelson – c’est le temps habituel dans cette région qui est un peu la Côte d’Azur de la Nouvelle-Zélande. Nous terminons nos lessives, nettoyage du réservoir d’eau, et autres réjouissances, et nous nous remettons en route. La prochaine région que nous allons découvrir est celle des Marlborough Sounds, un dédale de vallées inondées situé presque en face de Wellington. Mais comme la saison avance, et que nous avons une date butoir au premier mai pour l’expiration de notre visa, il nous faut repenser à faire route vers le nord. Notre visite des Marlborough Sounds sera donc faite en attente d’une fenêtre météo, et susceptible d’être écourtée dès qu’on pourra profiter d’un vent du sud.
En fait, malgré notre surveillance assidue de la météo, nous aurons tout le temps pour visiter les Sounds, comme on dit. Pendant deux semaines, le vent va s’acharner à souffler du nord ou à s’évaporer. C’est d’ailleurs au moteur que nous remontons la côte est de la Tasman Bay, faisant escale d’abord dans Croisilles Harbour pour une nuit, puis dans Greville Harbour, sur D’Urville Island, pour une autre. Etonnamment, on trouve plusieurs noms français dans cette région, datant du voyage de Dumont d’Urville en 1827. Les paysages changent par rapport à l’autre côté de la Tasman Bay : plus de plages dans les diverses criques, qui sont boisées jusqu’à l’estran, les mouillages deviennent plus profonds, et les collines se jettent dans l’eau sur un littoral bien plus déchiqueté. En fait, nous avons même fait l’impasse sur le French Pass, un étroit passage, balayé par de violents courants de marée, et qui permet de passer à l’intérieur de D’Urville Island (c’est dans ce passage où Dumont d’Urville talonna par deux fois avec sa corvette L’Astrolabe). Comme le temps est vraiment calme, nous en faisons le tour, passant entre le Cape Stephens et la petite île du même nom. Au loin, très au loin même puisqu’il est à 85 milles, on aperçoit le volcan Taranaki (ou Mt Egmont), que malheureusement nous n’aurons pas le temps d’aller voir de plus près. C’est l’un des sommets le plus emblématiques de l’Ile du Nord, et il viendra rejoindre la liste des choses qu’il nous restera à voir lors d’un hypothétique nouveau séjour, un jour…
C’est ensuite que se lève enfin le vent, nous permettant de gagner l’entrée du Pelorus Sound à bonne vitesse. Pelorus, c’est l’un des deux grands bras de mer qui viennent pousser leurs tentacules à l’intérieur des terres (les légendes maories veulent d’ailleurs que les Sounds aient été formées par une pieuvre). Il faut le remonter sur trente milles environ pour atteindre le petit village de Havelock, et un autre bras, le Kenepuru Sound, est encore plus éloigné de la mer ouverte. Cependant, nous n’irons pas jusque là, choisissant de visiter le plus court Tennyson Inlet. La remontée demande du travail : nous découvrons combien la navigation dans les Sounds est exigeante et complexe, le vent étant dévié, renforcé, canalisé, masqué par le relief. Jamais il ne consent à souffler cinq minutes avec la même force et direction, et il nous accapare donc à chaque instant, nous surprenant malgré tout ici ou là par une forte rafale descendue balayer un calme plat, ou par une refusante là où nous étions au portant. Fleur de Sel vient mouiller ce soir là dans la Ngawhakawhiti Bay, où nous passons quelques jours. Ici la forêt est encore originelle, faite d’espèces qui nous sont maintenant devenues familières, tandis que dans d’autres baies et chenaux que nous avons vus en chemin, il y a soit eu beaucoup de déboisement pour les fermes d’élevage, soit pour y planter des forêts de pins importés pour le bûcheronnage.
Le Nydia Track, un joli sentier de randonnée, passe non loin, et nous partons crapahuter dans cette jungle de hêtres et de fougères, en nous faisant récompenser au col qui surplombe notre baie par une belle vue vers la Nydia Bay voisine. Ce soir là, nous faisons aussi connaissance avec Robin et Bob, dont le Syrah partage le mouillage avec Fleur de Sel. Ces américains du Maine sont maintenant installés en Nouvelle-Zélande depuis onze ans, et c’est très intéressant et amusant d’avoir leur point de vue sur la vie dans ce pays encore plus jeune que le leur. Lors d’un verre puis d’un dîner chez eux, nous refaisons le monde avant de consentir à aller nous coucher. Le lendemain, nous ressortons plus à l’ouvert du Pelorus Sound, vers Homestead Bay. C’est un très joli petit coin, un peu venté cependant, et entouré de fermes et de parcs à moules (ici ce sont des moules vertes). Nous grimpons sur les crêtes alors que le soleil est éclatant, et nous avons une superbe vue sur les environs. Et en revenant, nous achetons du pain au lodge situé dans la baie voisine. Pratique, car il n’y a pas d’autres magasins dans le coin. La jeune femme qui s’en occupe nous indique que nous sommes à trois heures de route de Nelson, qui n’est pourtant qu’à 80km, c’est dire si c’est isolé !
Une bonne navigation en eaux un peu plus ouvertes nous a ensuite permis de rejoindre l’autre grand bras de mer, le Queen Charlotte Sound. Il convient de bien calculer la marée pour naviguer ici, car les courants peuvent être violents, mais tout se passe à merveille. Comme le vent est plutôt tranquille, on parvient même à emprunter le passage à terre du phare du Cape Jackson, et nous nous engouffrons ensuite chez la reine Charlotte. C’était, vous le savez peut-être, l’épouse du roi Georges III, et c’est en son honneur que cette longue ria fut baptisée par James Cook. Encore lui… C’est que l’anse devant laquelle nous passons maintenant, Ship Cove, fut son repaire favori en Nouvelle-Zélande. Lors de ses trois voyages, il y passa un total de six mois au mouillage ! C’est ici qu’eurent lieu les premiers contacts soutenus entre européens et maoris, et l’endroit revêt donc une importance particulière pour les kiwis. Pour Fleur de Sel, nous choisissons cependant le mouillage plus protégé de Resolution Bay, juste derrière la pointe, et nous empruntons un tronçon du célèbre Queen Charlotte Track pour rallier Ship Cove à pied. On peut alors se rendre compte des lieux évoqués dans les journaux de Cook, et un gros monument est érigé en son honneur au fond de la baie.
Au retour, par un hasard incroyable, nous croisons Danica et Mike du voilier Mirabilis que nous avions rapidement croisés aux Tonga et à Opua. Ce couple habite à l’année à bord, dans la marina de Wellington où nous avons étalé une belle tempête, et ils sont ici avec un autre couple d’amis, Kali et Jacob, pour passer le week-end de Pâques. Nous sommes invités à prendre un verre avec eux ce soir là et c’est l’occasion de faire plus ample connaissance dans la joie et la bonne humeur. Le lendemain, nous ressortons un peu pour mouiller temporairement devant Motuara Island. Cette île est un véritable concert d’oiseaux, mais malheureusement nous en verrons peu. Peut-être étaient-ils effrayés par le monde en ce long week-end pascal ? La montée au sommet, cependant, vaut la peine : on peut y admirer un panorama complet sur cette partie des Sounds, et de plus c’est ici que Cook (encore…) prit possession du pays pour la couronne anglaise. Une nouvelle navigation (toujours animée par molles, rafales, refusantes, etc.) nous mène ensuite vers l’intérieur, au fond de l’Endeavour Inlet. C’est là que nous retrouvons Mirabilis, maintenant à couple d’un de ses copains, Windflower II, et nous passerons la nuit amarrés tous les trois sur le même corps-mort ! Il faut dire que le mouillage n’est pas particulièrement bon, et qu’un front passant cette nuit là, il valait mieux être sûrs de ne pas déraper sur l’escadre pascale assemblée devant le Furneaux Lodge.
Et puis, comme le week-end tire déjà à sa fin, c’est l’heure des adieux, Mirabilis devant rependre le chemin de Wellington, tandis que nous nous enfonçons un peu plus profondément encore dans le Queen Charlotte Sound, toujours en attente d’une occasion de remonter vers le nord. Celle-ci se précise cependant pour le mercredi, et nous passons les deux jours qu’il nous reste dans la Mistletoe Bay, un endroit ici encore très joli, et même un peu mieux protégé, nous semble-t-il, que ceux plus vers le Détroit de Cook. C’est que lorsqu’on est non loin de cet entonnoir naturel, le vent peut véritablement souffler avec violence, tandis qu’en s’écartant un peu on sort véritablement du courant d’air, et nous sommes ainsi toujours abasourdis d’entendre les relevés de vent qui peuvent donner 40 nœuds dans le détroit et 5 à peine à Nelson, distante d’à peine 50 milles. Finalement, entre le relief, le soleil et le vent, cette côte a un peu un caractère méditerranéen ! Et la navigation se fait soit voiles arisées, soit au moteur, ici aussi comme en Méditerranée. Il fait d’ailleurs beau pour nos derniers jours dans les Sounds, et nous en profitons pour nous reposer après quelques nuits un peu agitées. Mais nous nous dégourdissons aussi les jambes, un superbe sentier permettant de rejoindre le Queen Charlotte Track et de gagner ensuite le sommet du Onahau Lookout. Le panorama y est peut-être le plus beau de ceux que nous avons vus dans les Sounds, avec des bras de mer de tous côtés. Sur l’autre versant de l’isthme de Te Mahia, c’est le Kenepuru Sound, distant de 70 milles par voie de mer, et d’1km à peine à pied ! Les marées, d’ailleurs, sont bien différentes d’un côté et de l’autre.
Endroit fascinant que les environs de ce Détroit de Cook, petite ouverture de 15 milles de large entre deux îles montagneuses, et où non seulement le vent vient s’engouffrer avec violence, mais aussi les courant de marées. Pensez que l’onde de marée fait deux fois par jour le tour de la Nouvelle-Zélande dans le sens antihoraire, et qu’à l’est (Wellington), c’est donc à peu près la marée haute lorsque elle est basse à l’ouest (dans les Marlborough Sounds), et inversement. On comprend ainsi qu’il puisse y avoir trois, parfois quatre nœuds de courant, et localement plus encore autour de certains caps et sur certains hauts-fonds. Comme en plus venturi vient ajouter son grain de sel, la mer peut devenir dantesque au point de mettre en difficulté même de gros paquebots (voir le désastre de la Wahine, que nous avions découvert à Wellington). La fenêtre météo attendue n’est donc pas simple à trouver. Il nous faut du vent de nord pour sortir du détroit vers l’est, et du vent de sud ensuite pour remonter la côte. Cela signifie donc qu’il faut prendre un front en mer, du côté du Cape Palliser. Nous travaillons donc avec précision le timing des courants, et celui des prévisions de vent, pour aboutir à la conclusion qu’il faut partir le mercredi à la mi-journée, pour franchir le Tory Channel en fin d’après-midi. Et c’est donc dans la boucaille, par un vent déjà frais, que nous levons l’ancre pour nos adieux à l’Ile du Sud. En route vers des eaux plus chaudes, mais auparavant il faut négocier ce Détroit de Cook…